Extrait : Les grands quotidiens comme médium artistique
Réf : catalogue exposition Céret (p 63-65)
Les grands quotidiens peuvent comme les tampons caoutchouc de la bureaucratie, comme la signalisation routière et urbaine, comme la pharmacie, être des médias populaires, non élitistes que l’artiste s’approprie et détourne de leur usage courant, tout en exploitant la force de communication. Répondant à l’invitation de la Fondation de Appel à Amsterdam en 1978, j’ai proposé au grand quotidien hollandais Het Parool de réaliser une page par jour pendant une semaine, avec les habitants d’un quartier central de la ville, le Jordaan (20.000 habitants), celui qui est célèbre pour ses canaux.
Opération comparable à celle d’Amsterdam, mais cette fois dans l’ensemble d’une ville, plus petite, Guebwiller (12.000 habitants). Un thème est proposé « Comment imaginez-vous l’avenir ? ».
D’autres expériences en 1977-78 ont consisté à convaincre de grands quotidiens français et allemands d’échanger pour un temps leurs pages d’information locale (traduite).
Une troisième série d’expériences a consisté à convaincre de grands quotidiens de me donner, gratuitement bien sûr, une pleine page blanche pour inviter leurs lecteurs à répondre à des questions que j’avais déterminées.
Ainsi, à Montréal en 1981-82, lors de mon exposition rétrospective au Musée d’art contemporain, je choisis d’initier une enquête sur l’identité imaginaire des Québécois, en posant deux questions : « Qui pensez-vous être ? Qui voudriez-vous être ? »… Il en résulta la publication l’année suivante de L’Oiseau-chat, roman-enquête sur l’identité québécoise (édition La Presse).
J’ai répété l’expérience en 1984 avec le journal Le Droit à Ottawa sur le thème de l’Outaouais imaginaire, puis repris l’enquête québécoise, vingt cinq ans plus tard, cette fois avec le journal Le Devoir en posant les deux questions suivantes : « Québec imaginaire, Canada réel ? » dont j’ai analysé les réponses dans L’avenir en suspens (Editions VLB, 2008).