Lyon, gare des Brotteaux – avril 1979
Terminus tout le monde descend, Salle d’attente de première classe de la gare des Brotteaux, Festival d’art.
Gare terminus
Extrait du catalogue de Céret (p 67)
Rendez-vous était pris dans la salle d’attente de 1ère classe de la gare terminus de Lyon Les Brotteaux, à 17h30. Orlan, après de multiples négociations menées avec les responsables de la S.N.C.F. avait réussi à obtenir cette possibilité selon mon désir.
Le personnel des chemins de fer n’était guère convaincu de l’intérêt d’une performance d’artiste dans leur salle d’attente. Peu sûrs de leur accord définitif, nous sommes entrés discrètement nous asseoir sur les bancs de chêne. Un employé est venu cependant prier les voyageurs dont l’aspect semblait à ses yeux mieux cadrer avec la salle d’attente de 2e classe de quitter les lieux (valises, vêtements et couleur de peau des travailleurs émigrés semblèrent être ses critères). Pendant la performance d’autres voyageurs vinrent s’asseoir parmi nous respectueusement. L’artiste sortit de son sac une petite locomotive en plastique noir et rouge munie de piles lui assurant un déplacement circulaire autonome sur le carrelage (d’époque) de la salle. On entendait aussi les trains arriver en gare et chaque fois, pendant le grincement des freins, l’artiste devait s’arrêter de parler. L’artiste cheminot d’occasion s’en prit dès le début à l’avant-garde qu’il compara de façon hétéroclite, tantôt au concours Lépine de la nouveauté, tantôt à une petite société secrète initiatique, tantôt – et ce fut son principal argument – à une gare terminus. L’artiste se plaignait à haute voix, monologuant tristement dans cette salle d’attente, assis sur le banc de chêne, sans valise, répondant aux questions des autres voyageurs en attente. Un train arriva encore, dont le grincement des freins l’obligea à s’arrêter. On se quitta.